la mort du tambour

Deuxième billet de cette série que j’ai décidé d’intituler « La série métamorphique ».
Le premier billet, « Les funérailles de la Pékan – une porte s’ouvre », peut être lu
ici.

Mon tambour…
J’ai commencé à cohabiter avec ce tambour en avril 2014. Cadeau de fête de moi à moi, il a été un coup de cœur puissant et pendant de nombreuses années, il m’a accompagné à travers plein de petits et grands moments, des célébrations, des cercles, des méditations guidées, etc. Mais en mars 2021, notre relation a frappé un mur. J’observais déjà que depuis plusieurs semaines elle s’effritait un peu plus à chaque jour et que je ne sentais plus tant l’appel d’en jouer. Je le déposais près de moi lors de moments importants mais sans plus.

Le 22 mars 2021 mon vase a débordé. Je venais de finir d’enregistrer une longue méditation guidée qui s’adressait aux participantes de la cohorte de la Roue Totémique de cette période. Super fière du résultat (mes méditations guidées sont toujours spontanées), j’écoute l’enregistrement et je réalise que la qualité du son est désastreuse. Je constate que je ne réussis toujours pas à enregistrer, d’une façon simple et qui me plait, à la fois ma voix et celle de mon tambour. Ma colère gronde. Une partie de moi se sent trahie.

Ce n’est que plus tard que je réaliserai que, sans m’en rendre compte, j’avais commencé à considérer mon tambour comme un outil de travail au lieu de l’outil sacré et personnel qu’il est. Que je n’écoutais plus ses murmures aussi attentivement qu’avant. Que je tenais notre relation pour acquise afin de venir en aide aux autres.

Sauf que sur le coup, longtemps avant ces réalisations, tout ce que je constate c’est que le courant ne passe plus entre lui et moi. Et que mon impétuosité en a marre. Quelque chose doit changer. Mais quoi?

Cet après-midi de la méditation guidée ratée, je me dépose devant le feu. C’est en lui parlant et en regardant les flammes que me traverse pour la première fois l’idée de brûler mon tambour. Même si les Murmures me chuchotent de ne pas passer à l’acte maintenant, j’observe une espèce de joie à la possibilité de le faire.

Je n’en pouvais plus de le voir traîner dans mon espace. Quelque chose devait changer. J’ai commencé par retirer tous les ornements que je lui avais offerts au fil des ans afin d’essayer de nous alléger, de retourner à l’origine de notre relation et de recommencer d’une nouvelle façon.

Après quelques jours j’ai compris que ça prendrait plus que ça.
Je sentais un besoin de quelque chose de drastique. J’ai considéré le mettre en terre quelques jours ou semaines (je continue à croire que ça aurait été une excellente idée) mais les Murmures me chuchotaient de faire ça plus simple.

Le 7 avril 2021 je suis donc sortie dehors avec lui, guidée par les Murmures. En mettant les pieds dans ma cour mes yeux se sont déposés sur mon foyer extérieur, là où nous faisons nos feux de camp. Il n’en prend pas plus à mon Impétueuse intérieure pour qu’elle lance à nouveau sur la table l’idée qu’on pourrait tout simplement brûler mon tambour.

Oui c’était une option et je me suis assise avec mon tambour devant le foyer. Et j’ai attendu que la vision se précise, petit à petit. Suivant intuition et vision, j’ai déposé mon tambour à mes côtés et ai entrepris de vider le foyer de ses cendres, réalisant du coup qu’il était la grandeur parfaite pour y mettre mon tambour. J’ai laissé mon intuition guider mes gestes à 100%, me contentant d’observer avec curiosité. Maintenant qu’on avait nommé la possibilité de le brûler, plus rien ne m’étonnerait. Dans le « pire » des cas il serait brûlé et la quête pour un nouveau tambour serait lancée.

Mais d’un geste à l’autre, je me suis vu tapisser le fond du foyer de branches de cèdre et y déposer mon tambour. Je l’ai laissé là et suis rentrée chercher du tabac, du quartz, des pétales de rose et ma racine de Renouée du Japon.

C’est en déposant cette grande racine que j’ai su que je n’allumerais pas de feu sous mon tambour. C’était claire que je ne brûlerais pas cette racine. J’ai mis le grillage sur le foyer et me suis assise, en mode observation et ressenti.

Et là, clarté !!!!!!

Le tambour était dans son tombeau et y resterait trois jours. Je ne savais pas trop ce que la météo nous réservait ni dans quel état mon tambour ressortirait de cette initiation, mais je sentais que tout ça était hyper juste.

En plus, trois jours nous amèneraient au 10 avril, ma date de naissance…

Le 10 avril arrivé, j’ai pris mon temps. De toute façon, j’avais tout d’abord un rituel de fête à faire en forêt (sujet du prochain billet de cette série 😉 ) et ce n’est qu’en début d’après-midi que je suis allée chercher mon tambour. J’étais émue de le sortir de là, heureuse de constater qu’il était sain et sauf même si sa peau était particulièrement tendue. Nous sommes rentrés à l’intérieur et il a demandé d’être brumisé d’hydrolat de ylang ylang. C’est donc ce que j’ai fait, constatant avec déception que cet hydrolat, une fois vaporisé sur du cuir chaud, perdait son odeur suave et dégageait plutôt une étrange odeur de vieux popcorn… Rien de tel pour refroidir les ardeurs! J’ai compris que le passage n’était pas terminé et que je devais continuer à faire totalement confiance au processus. J’ai déposé mon tambour sur mon autel puis suis sortie.

Ce soir-là, juste avant minuit, j’ai allumé un feu afin de brûler les restant de mon rituel de fête et j’y ai joint les branches de cèdres, le tabac et les pétales qui avaient accompagnées la transformation de mon tambour.

J’aimerais dire qu’ensuite nous avons reconnecté instantanément et que je me suis remise à drummer quotidiennement. Mais ce n’est pas ainsi que la suite s’est déroulée. Notre relation s’est rebâti un pas à la fois, de façon très organique et intime. J’ai eu l’impression qu’il m’aidait à apprivoiser une nouvelle étape de ma Médecine et que pour l’instant nos sessions de drumming ne voulaient pas être partagées.

En fait, il m’a aidé à réaliser qu’à cette période de ma vie, ma véritable envie était de pouvoir drummer pour moi tout d’abord, pour l’invisible aussi, et que si et seulement si j’en sens l’élan profond, de le partager avec les autres. Ce fut d’ailleurs le cas, quelques mois plus tard, lors d’un grand feu de passage sur le terrain de deux amies bien chères à mon cœur. J’avais apporté mon tambour lors de ce voyage, juste au cas. Et ce n’est que lorsque le feu a été presque entièrement consumé que j’ai senti l’élan de drummer et chanter pour elles, pour ce territoire, pour la relation qu’elles entretenaient avec lui, pour la vie, pour le sacré et pour plus grand que nous.

Ce moment grand et puissant m’a confirmé que mon tambour et moi étions encore un duo fantastique et que oui, quand l’élan montait spontanément, que nous pouvions encore drummer et chanter pour les autres.

L’hiver dernier j’ai senti qu’éventuellement je le décorerais d’une nouvelle façon. Je me suis mise à voir des animaux et des êtres apparaitre sur sa peau dont certains qui semblaient vouloir y être éventuellement dessinés ou peints.

Fast forward au 24 juin dernier. Suite à un retour en force de ma Sorcière intérieure, retour aussi inattendu que puissant, fracassant et décapant, alors qu’elle menaçait de détruire quelque chose, j’ai pris tambour, chandelle, sauge, pinceaux et peinture et me suis installée dehors pour peindre mon tambour. Une fois de plus j’ai totalement lâcher prise et fait confiance au processus. Est-ce que mon tambour serait mieux une fois peint? Serait-il à mon goût? Aurait-il un bon son? Est-ce que j’étais dans un bon état d’esprit pour peindre quelque chose de si important? Rien ne le garantissait et en moi une petite voix me murmurait que dans le pire des cas mon tambour serait scrap, que je l’enterrerais en quelque part et que j’en trouverais un autre.

Y’a rien comme accepter profondément une possible fin pour ouvrir la porte à ce qui veut naitre.

Cette soirée à peindre ce qui apparaissait sur sa peau a été vraiment spéciale. Surprise et satisfaite du résultat, je l’ai déposé dans mon atelier en me demandant bien quel son il aurait une fois sec.

Je suis agréablement surprise de pouvoir dire qu’il sonne encore mieux qu’avant et que je nous sens encore plus au diapason l’un de l’autre.

Il me reste à lui mettre une couche protectrice, ce que je ferai aujourd’hui.

Cette mort et renaissance aura pris 15 mois et ce n’est que maintenant que j’ai enfin l’impression que nous sommes de nouveau liés, prêts à approfondir ce lien et à découvrir où il nous mènera, un pas à la fois.

C’est à la fois étrange et fascinant de venir ici partager en différé ces expériences. Je réalise qu’en m’étant permis de les porter en moi beaucoup plus longtemps que d’habitude avant de les partager, je me suis aussi donné l’espace pour profondément les goûter, les habiter et les laisser me métamorphoser d’une façon encore plus profonde.

D’ailleurs, j’ai décidé de nommer cette série de billets « La série métamorphique ». Les regrouper sous ce titre nous permettra de mieux s’y retrouver puisqu’à travers ces billets d’autres s’inséreront, comme le prochain qui parlera de l’anniversaire de La Déesse Joyeuse qui arrive à grands pas!

Quant à lui, le prochain billet de la série métamorphique racontera l’histoire d’un rituel avec l’eau, ce rituel de fête dont j’ai fait mention plus haut dans ce texte.

À très bientôt!

2 thoughts on “la mort du tambour

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.